Le projet SOLER (Soudure Optimisée pour une Longévité Électronique Renforcée) vient de se terminer en aout 2025. D’une durée de trois ans et demi, il s’inscrit à la suite du projet FELINE dans une dynamique de transition vers des technologies plus respectueuses de l’environnement, en s’attaquant à l’un des défis majeurs de l’électronique : le remplacement des alliages de brasure au plomb par des alternatives sans plomb.
Un objectif central : fiabiliser les assemblages sans plomb
FELINE, s’est intéressé aux premières générations d’alliage sans plomb, le SAC 305 et a démontré sa fiabilité et ses limites. Dans cette nouvelle étude, SOLER visait à étudier la durée de vie des assemblages de composants électroniques montés sur circuits imprimés (PCB), en utilisant les nouvelles générations de crèmes à braser sans plomb, notamment les alliages SAC+ (alliages d’étain-argent-cuivre enrichis) et LTS (Low Temperature Solder) afin d’évaluer leur capacité à prochainement remplacer la première génération dans le but de toujours maintenir une fiabilité élevée, indispensable pour les secteurs de l’aéronautique et du spatial.
Dotés d’un budget de 1.4M€, de nombreux industriels ont pris part au projet : Thalès Alenia Space, Airbus, Elemca et Inventec et académiques IMS Bordeaux. Le CNES et la DGA ont également participé au projet.
Quatre objectifs scientifiques et techniques étaient attendus :
- Compatibilité et fiabilité des assemblages basse température
Le remplacement du plomb par des alliages SAC traditionnels augmente la température de refusion d’environ 34°C, risquant d’endommager les cartes électroniques. Les alliages dits « basse température » (LTS) représentent une solution prometteuse, mais encore peu documentée. L’étude vise à déterminer leur robustesse pour limiter les déformations et les contraintes thermiques sur l’assemblage. - Fiabilité des alliages SAC+ en environnement avionique
Les assemblages sur PCB avioniques seront testés avec une crème SAC+ pour évaluer leur durabilité. Des simulations numériques ont complété les essais expérimentaux afin d’identifier les zones les plus sollicitées mécaniquement. - Fiabilité des alliages SAC+ pour les applications spatiales
Dans un contexte de cyclage thermique extrême (par exemple de −10 °C à +100 °C), les assemblages ont été testés selon des profils optimisés pour maximiser les contraintes et représentatifs de l’environnement spatial. L’objectif était de garantir leur performance sur le long terme grâce à une caractérisation fine des matériaux. - Modélisation du comportement élastoviscoplastique des alliages SAC+
Pour améliorer la fiabilité des simulations par éléments finis et l’anticipation de la durée de vie, le projet s’attache à mieux comprendre les comportements mécaniques complexes des alliages SAC+ sous contraintes thermiques et vieillissement. Un champ encore peu exploré dans la littérature scientifique.
Des livrables conséquents
Le projet était divisé en plusieurs lots :
Lot 1 – État de l’art et spécifications
Objectif : Poser les bases techniques du projet en étudiant les connaissances existantes et en définissant les besoins industriels. Ce lot est le socle scientifique du projet. Il a permis de définir les matériaux, les conditions d’essais, et les méthodes utilisées par la suite.
Lot 2 – Compatibilité et fiabilité des assemblages basse température pour l’aéronautique
Objectif : Tester des alliages « basse température » pour limiter les contraintes thermiques lors de l’assemblage.
Ce lot a évalué si les alliages à faible température de fusion permettent de préserver l’intégrité des composants sensibles aéronautiques (BGA, QFN…) grâce à des analyses après refusion puis à la durée de vie de ces alliages sous cyclages thermiques, et une étude approfondie de la structure des joints de soudure après vieillissement.
Lot 3 – Fiabilité des alliages SAC+ pour l’aéronautique
Objectif : Tester la fiabilité de nouveaux alliages (SAC+ comme Innolot ou HTO) pour les cartes électroniques utilisées en avionique.
Ce lot vérifie si les alliages SAC+ peuvent être une alternative aux alliages classiques tout en assurant la robustesse nécessaire dans les avions grâce à des essais de cyclages thermiques d’assemblages avioniques représentatifs et une étude approfondie de la structure des joints de soudure après vieillissement.
Lot 4 – Fiabilité des alliages SAC+ pour le spatial
Objectif : Évaluer le comportement des mêmes alliages (SAC+) mais cette fois dans des conditions extrêmes liées à l’espace (vide, températures extrêmes…). Ce lot a poussé les tests plus loin, avec des conditions spécifiques au spatial, en lien avec les besoins de partenaires comme le CNES ou Thales Alenia Space.
Des travaux de recherche aux résultats prometteurs
Un post-doc mené durant le projet a apporté des contributions significatives. En associant essais de cyclage thermique et modélisation numérique (modèle d’Anand), l’étude a comparé les performances de deux générations d’alliages : SAC305 et SAC+. Elle devait permettre de comprendre comment et pourquoi ces soudures se détériorent, en particulier avec les nouveaux alliages dits SAC+ (modifiés avec des éléments comme le bismuth). En conclusion, le SAC+ dopé montre une meilleure tenue en fatigue que le SAC305, tout particulièrement dans des environnements thermiques sévères. Ces résultats valident l’intérêt des alliages enrichis pour des applications critiques.
Une suite amorcée
La suite de Soler est en cours avec le montage de Soler 2, avec pour objectif de poursuivre l’étude de la fiabilité des assemblages électroniques dans des environnements critiques, notamment en aéronautique et dans les applications spatiales. D’une durée de 42 mois et doté d’un budget prévisionnel de 1,8 million d’euros, SOLER 2 prolonge les travaux menés. Le lancement du projet est prévu au 1er trimestre 2026 et vise, à approfondir les connaissances sur la fiabilité des assemblages critiques sous stress mécanique (vibratoire et choc) complémentaires aux essais thermiques de Soler.
Les principaux futurs livrables du projet incluent :
- Une description des modes de défaillance,
- les paramètres de modélisation (Weibull, Anand, lois de fatigue),
- l’évaluation de la compatibilité des alliages à bas point de fusion,
- une étude spécifique du rework,
- et une méthodologie de surveillance non destructive, intégrant IA et mesures haute fréquence.
Fort des résultats obtenus dans SOLER, le projet SOLER 2 s’inscrit dans une continuité ambitieuse, avec des perspectives élargies pour la fiabilité des assemblages sans plomb. Les premiers résultats obtenus laissent entrevoir des avancées majeures pour l’électronique embarquée de demain.
